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mercredi 11 septembre 2013

FEMMES EXCEPTIONNELLES : OLYMPE DE GOUGES

Après un long silence sur ce blog, j’inaugure une nouvelle chronique sur les femmes exceptionnelles qui ont jalonné l’Histoire et que beaucoup d’entre nous ne connaissent pas. 


Olympe de Gouges, femme révolutionnaire guillotinée en 1973 pendant la Terreur à cause de son opposition avec le sanguinaire Robespierre est bientôt "panthéonisable" car elle est la Top 1 de la liste proposée par les associations féministes à ce vénérable monument pour que l'on y transfère ses restes. 




Tout le monde parle d'elle comme d'une féministe innovante mais on oublie souvent qu'elle a été guillotinée en raison de ses convictions non pas religieuses mais politiques et de sa liberté d'expression.

Et pas seulement parce qu'elle était une femme... Elle était en réalité une femme politique à part entière, à la plume acérée, polémiste, journaliste et auteur de nombreuses pièces d'un théâtre de critique sociale qui eut beaucoup de succès à son époque. Cela n'était pas pour plaire à ces messieurs qui gouvernaient le monde en n'aimant pas qu'on les critique...


Voila quelques extraits de textes méconnus que publia Olympe de Gouges et qui lui valurent la guillotine parce que ce n'était pas politiquement correct d'affirmer tout ça à son époque.  

Dans le "Postambule" qui conclut sa célèbre Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne, Olympe de Gouges osa écrire : 

Postambule

Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l'univers ; reconnais tes droits. Le puissant empire de la nature n'est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonges. Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l'usurpation. L'homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers. Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne. O femmes ! Femmes, quand cesserez-vous d'être aveugles ? Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. Dans les siècles de corruption vous n'avez régné que sur la faiblesse des hommes. Votre empire est détruit ; que vous reste-t-il donc ? La conviction des injustices de l'homme. La réclamation de votre patrimoine, fondée sur les sages décrets de la nature ; qu'auriez-vous à redouter pour une si belle entreprise ? Le bon mot du Législateur des noces de Cana ? Craignez-vous que nos Législateurs français, correcteurs de cette morale, longtemps accrochée aux branches de la politique, mais qui n'est plus de saison, ne vous répètent : femmes, qu'y a-t-il de commun entre vous et nous ? Tout, auriez-vous à répondre. S'ils s'obstinent, dans leur faiblesse, à mettre cette inconséquence en contradiction avec leurs principes ; opposez courageusement la force de la raison aux vaines prétentions de supériorité ; réunissez-vous sous les étendards de la philosophie ; déployez toute l'énergie de votre caractère, et vous verrez bientôt ces orgueilleux, non serviles adorateurs rampants à vos pieds, mais fiers de partager avec vous les trésors de l'Être Suprême. Quelles que soient les barrières que l'on vous oppose, il est en votre pouvoir de les affranchir ; vous n'avez qu'à le vouloir. Passons maintenant à l'effroyable tableau de ce que vous avez été dans la société ; et puisqu'il est question, en ce moment, d'une éducation nationale, voyons si nos sages Législateurs penseront sainement sur l'éducation des femmes.
Les femmes ont fait plus de mal que de bien. La contrainte et la dissimulation ont été leur partage. Ce que la force leur avait ravi, la ruse leur a rendu ; elles ont eu recours à toutes les ressources de leurs charmes, et le plus irréprochable ne leur résistait pas. Le poison, le fer, tout leur était soumis ; elles commandaient au crime comme à la vertu. Le gouvernement français, surtout, a dépendu, pendant des siècles, de l'administration nocturne des femmes ; le cabinet n'avait point de secret pour leur indiscrétion ; ambassade, commandement, ministère, présidence, pontificat, cardinalat ; enfin tout ce qui caractérise la sottise des hommes, profane et sacré, tout a été soumis à la cupidité et à l'ambition de ce sexe autrefois méprisable et respecté, et depuis la révolution, respectable et méprisé.

Dans son plaidoyer pour se défendre devant le Tribunal Révolutionnaire où on ne lui accorde même pas d'avocat, Olympe est obligée de se défendre toute seule et écrit autant aux juges qu'à ses bourreaux. Cet écrit a été conservé par l'Histoire.  

Plaidoyer d’Olympe de Gouges,
rédigé avant sa comparution devant

le Tribunal révolutionnaire

EXTRAITS

TRIBUNAL redoutable, devant lequel frémit le crime et l’innocence même, j’invoque ta rigueur, si je suis coupable ; mais écoute la vérité :
L’ignorance et la mauvaise foi sont enfin parvenues à me traduire devant toi : je ne cherchais pas cet éclat. Contente d’avoir servi; dans l’obscurité, la cause du peuple, j’attendais avec modestie et fierté une couronne distinguée que la postérité seule peut donner, à juste titre, à ceux qui ont bien mérité de la patrie. Pour obtenir cette couronne éclatante, il me fallait sans doute être en butte à la plus noire des persécutions ; il fallait encore plus : il me fallait combattre la calomnie, l’envie, et triompher de l’ingratitude. Une conscience pure et imperturbable, voilà mon défenseur.
Pâlissez, vils délateurs ; votre règne passe comme celui des Tyrans. Apôtres de l’anarchie et des massacres, je vous ai dénoncés depuis longtemps à l’humanité : voilà ce que vous n’avez pu me pardonner.
Vieux esclaves des préjugés de l’ancien régime, valets gagés de la cour, républicains de quatre jours, il vous sied bien d’inculper une femme née avec un grand caractère et une âme vraiment républicaine ; vous me forcez à tirer vanité de ces avantages, dons précieux de la nature, de ma vie privée et de mes travaux patriotiques.
Les taches que vous avez imprimées à la nation française ne peuvent être lavées que par votre sang que la loi fera bientôt couler sur l’échafaud. En me précipitant dans les cachots, vous avez prétendu vous défaire d’une surveillante, nuisible à vos complots. Frémissez, Tyrans modernes ! Ma voix se fera entendre du fond de mon sépulcre. Mon audace vous met à pis faire ; c’est avec le courage et les armes de la probité que je vous demande compte de la tyrannie que vous exercez sur les vrais soutiens de la patrie.
Et vous, Magistrats qui allez me juger apprenez à me connaître ! Ennemie de l’intrigue, loin des systèmes, des partis qui ont divisé la France au milieu du choc des passions, je me suis frayé une route nouvelle ; je n’ai vu que d’après mes yeux ; je n’ai servi mon pays que d’après mon âme ; j’ai bravé les sots, j’ai frondé les méchants et j’ai sacrifié ma fortune entière à là révolution. (...)
Robespierre m’a toujours paru un ambitieux, sans génie, sans âme. Je l’ai vu toujours prêt a sacrifier la nation entière pour parvenir à la dictature ; je n’ai pu supporter cette ambition folle et sanguinaire, et je l’ai poursuivi comme j’ai poursuivi les tyrans. La haine de ce lâche ennemi s’est cachée longtemps sous la cendre, et depuis, lui et ses adhérents attendaient avec avidité le moment favorable de me sacrifier à sa vengeance. (…)
Les lois républicaines nous promettaient qu’aucune autorité illégale ne frapperait les citoyens ; cependant un acte arbitraire, tel que les inquisiteurs, même de l’ancien régime, auraient rougi d’exercer sur les productions de l’esprit humain, vient de me ravir ma liberté, au milieu d’un peuple libre.
À l’art 7 de la Constitution, la liberté des opinions et de la presse n’est-elle pas consacrée comme le plus précieux patrimoine de l’homme ? Ces droits, ce patrimoine, la Constitution même, ne seraient-ils que des phrases vagues, et ne présenteraient-ils que des sens illusoires ? Hélas ! J’en fais la triste expérience...

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